Ça y est, je suis à Ankara.
Petit "flash back" sur ces 11 derniers jours... ça va être difficile, car chaque étape était vraiment très différente de la précédente ! Istanbul me parait déjà terriblement loin, j'ai la sensation d'être parti depuis des semaines.
Commençons par le début : le premiers jour. C'était très sympa, après avoir dit adieu à mes colocataires en or, j'ai traversé le Bosphore et j'ai passé la journée à longer le boulevard maritime le long de la mer. Il y avait peu de circulation, beaucoup de verdure, la mer, le soleil... idéal.
Le soir, je quitte le rivage pour chercher un premier logement (je suis arrivé à Pendik).
A partir de là, ça se dégrade.
J'avise la mosquée et tente ma chance. Le second de l'Imam (Hamid) veut bien m'aider, mais c'est ce dernier qui décide. Et tout ce que j'obtiens, c'est un sermon sur l'unicité de Dieu et l'hérésie de la Trinité... raté. Pas au point. Cependant, Hamid m'emmène dans un petit hôtel et me négocie un prix normal. Tant pis, on réessayera demain.
A partir du lendemain, les conditions de voyage se détériorent : il va pleuvoir ou neiger tous les jours jusqu'à Ankara. Je pensais mettre une journée pour sortir de l'agglomération d'Istanbul : je mettrais 3 jours pour enfin voir un peu de verdure. 3 jours passé sur le bord de la route national D100, mon parapluie à la main, tachant d'esquiver les gerbes d'eau boueuses que me balancent les camions (j'en prends quand même 2 ou 3 dans la figure), à me demander quand je pourrais enfin sortir de cette suite de zones urbaines et industrielles qui s'étendent le long de la route.
Ça dure comme ça jusqu'à Izmit. La ville suivante est Adapazarı : je constate aue je peux emprunter à partir de là une autre route pour Ankara. Ça fait un peu plus de km, mais c'est tout vu : let's go.
Effectivement, ça change. En mieux ! D'abord, il n'y a plus personne. Un véhicule toutes les 10 minutes. Je suis en plaine campagne, et ce que je perds en sécurité (fréquence de points d'approvisionnements, hôtels), je le gagne en calme, tranquillité, et décorum. En longeant une petite ville (Akyazı), un homme m'interpelle et me propose de prendre un thé au Çaihane (café) d'à coté. Là, j'arrive tant bien que mal à expliquer mon histoire. celle-ci fait sensation et créée l'attroupement. Un type qui ressemble à Louis la Brocante s'y intéresse tout particulièrement, en parlant très fort, avec de grands gestes. Il veux tout savoir mais ne parle pas un mot d'anglais. İl appelle sa femme (ou sa cousine, j'ai pas compris) qui parle un peu français, et arrive à la question : mais où va-tu dormir ce soir ? Je ne sais pas, en tout cas je compte chercher dans le village suivant : kuzuluk. J'apprends qu'il y a là-bas un grand hôtel avec beaucoup d'étoiles car il y a une célèbre source d'eau chaude et les gens viennent pour des cures thermales. A partir de là, ça devient bien pour moi : je vous passe les détails, mais au final, lui et un de ses amis vont me négocier un prix d'amis (le logement passe de 150 ytl à 40 ytl) qu'ils m'offriront de toute façon ! Je me retrouve propriétaire pour une nuit d'un logement 3 pièces avec jaccuzie branché direct sur l'eau chaude... Tout ce que j'ai à faire, c'est rendre la clef demain à 9 heures... Top. Première action : un bain bien chaud !
Je repars le jours suivant sous le soleil, d'humeur radieuse. Je mets un temps fou à accomplir 20 km, mais je suis surpris d'arriver à 14H30 à ma destination du jour ! Il y aura d'autres surprises : ma carte raconte n'importe quoi. Bref, hors de question de m'arrêter si tot. J'arrêterai dans le premier village que je trouverai après 17H30... Sauf que la route change brusquement : elle monte dans les montagnes tournant sans cesse et rallongeant démesurément les distances, et les nuages, eux descendent. D'abord la pluie, puis la grêle, puis la neige, accompagnée de grouillard. Et plus un seul village. Moi qui en croisais un tous les 5 km ! La nuit commence à tomber... Après 3 heures de marche, je commence un peu à fatiguer, mais je ne peux pas m'arrêter. Il n'y a aucun abris, il fait froid, et puis je dois bien arriver quelque part. Bref, je vais marcher jusqu'à 20H (soit 25 km). Il fait nuit noir depuis longtemps, je ne vois pas grands chose hormis la ligne blanche de la route (pas de lune) et passe le village de Çavrısdere sans le voir. Je réalise que je l'ai dépassé en regardant l'heure : je suis trop loin. J'avise quelques baraquements et de la lumière : allons-y.
Je frappe : la porte est ouverte. "Iyı Akşamlar !" "Salam Aleikum !" (soyons poli). Une tête apparait. il me fait signe d'entrer. İl ne semble pas surpris de me voir débarquer chez lui avec ma tête d'épouvantail à une heure indue : je le soupçonne de m'avoir repéré sur la route dans la journée. Je sors mon petit papier pour expliquer qui je suis, ce que je fais, ce que je veux (Merci à Anlame, ma colocataire Turque, qui me l'a écris !), mais il n'y prête guère attention. Un genre de solitaire peu curieux. Il semble vivre dans une sorte de préfabriqué et passe visiblement la soirée seul en compagnie d'une télé, une maquette en bois et un fourneau. T'as faim ? Oui. Il disparait et revient au bout de 5 min avec un bon repas. Thé ? Avec plaisir. Dodo ? oui ! Il m'a préparé un lit avec un radiateur électrique. Il m'avertis simplement qu'il me faudra partir à 6 heures. Pas de problème, c'est mon horaire habituel. Et je m'écroule comme une masse.
Le lendemain, il neige. Je constate en partant après avoir remercié mon hôte que j'étais dans une sorte de camps militaıre avec barrières et drapeau, et le type devait être le gardien... d'où la nécessité de partir avant que les autres reviennent.
Et je me lance dans un 2eme "coup de collier" de 45 km : tant que je marche, je n'ai pas froid, mais pas question de faire plus de 5 minutes de pause. Ça a son côté motivant, mais j'arrive complètement à plat à Mudurnu (panne d'énergie : on fait pas 45 km le ventre vide !). Le jour suivant, la neige tombe à gros flocons : c'est rigolo, mais je ne peux encore pas m'arrêter.
Je croise parfois un village, mais ce ne sont que quelques maisons misérables regroupées autour d'une mosquée (neuve) sans rien à offrir (ni à vendre). Heureusement, la route descent enfin et la neige cesse quand j'arrive le soir à Nallıhan.
Le lendemain, le paysage ne cesse de changer tous les 10 km : plus de montagne ni de neige, mais des plaines arrides succédantà des plaines cultivées, des collines blanches, rouges, jaunes, un site saisissant de collines vertes et rouges... Un lac, des cigognes, je ne sais plus trop où je suis, j'ai le doigt rivé sur le déclencheur de l'appareil photo, jusqu'à Çayıhan.
C'était le point culminant. Le décors pour les deux derniers jours devient morne avant de revenir dans l'agglomération d'Ankara. Mais le froid, lui, persiste ! 3°C dans la journée, beaucoup moins la nuit. Et puis à force de faire des distance de 40 à 50 km d'une traite, mes pieds commencent à protester. Une pose à Ankara s'impose.
vendredi 20 mars 2009
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4 commentaires:
Hello
toujours aussi passionnant ton voyage!! Mais ou as tu dormi les derniere nuit avant d'arriver à Ankara?? Tu nous laisses sur notre faim!!
biz
sarah
Merhaba Gauthier!
J'ai lu avec grand plaisir la première étape de ton périple au départ d'Istanbul. Content pour toi que malgré les difficultés tu gardes le moral et l'envie de faire ta route!
Bon vent et courage dans les moments difficiles. Le soleil est toujours au bout!
Ciao
Florent
(istanbloug.wordpress.com)
Salut Gautier, c'est Jan du magasin de Nanterre, on suit tous tes éxploits de notre petit train-train quotidien!! Bravo pour le parcours accomplis et courrage pour ce qu'il reste à faire, en tous les cas tu as l'air d'y prendre ton pieds... Enfin bref, continue à nous envoyer des news, on s'ennuie quand on en voit pas!!
A bientôt.
Jan
Salut !
Merci pour les encouragements. De mon côté, j'ai échangé les difficultés de la marche contre les difficultés du logement. Je fais de plus grandes distances, mais j'ai plus de mal pour trouver où dormir. Mais le moral est toujours impeccable, aussi grâce à votre soutient à tous...
Ciao
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