Fin du Chapitre II Istanbul/New-Delhi

Enfin...

Je n'en voyais plus le bout !

Je suis vraiment heureux d'etre arrive dans la capitale indienne, car ce parcours de la Turquie a l'Inde s'est avere penible. J'ai appris beaucoup de choses, cependant, et ca n'avait rien a voir avec les experiences des 6 premiers mois.

Physiquement c'etait plus dure, meme si le sac etait plus leger. Le climat glacial en Anatolie, ou brulant en Iran et en Asie Centrale, a renforce le challenge, tout comme les distances a parcourir chaque jour pour trouver ou dormir et le poids du manque de sommeil, qui a considerablement influence ma facon de voyager. En Europe, grace a ma tente, je dormais toutes les nuits de 8 a 10 heures sans problemes, et marchais 20 jours d'affile sans soucis. A present, je suis vanne au bout de 5 jours de marche et dois faire etape pour me reposer, et je dois constamment pomper sur le morale et la volonte pour palier le manque d'energie... ca use.
Des temps de pauses... j'ai en realite beneficie de "pauses" forcees inattendues et parfois tres longs lors des differentes quetes de visas. Je ne savais pas en quittant la France ce qui m'attendait. Je n'avais jamais fais un visa de ma vie. J'ai appris. Moi qui deteste l'administration, je peux dire que j'ai ete servis. Les etranges regles de fonctionnement en Iran, l'administration corrompue et opaque d'asie centrale, l'esprit incroyablement mefiant des chinois, l'ahurissante desinvolture des pakistanais... J'ai eu de tout, et j'ai perdu au total plusieurs semaines a tourner en rond dans les capitales en attendant mon visa. Au moins etais-je pret lorsque venait le temps de reprendre la marche.

Autre parametre participant a la fatigue : la qualite de l'eau, de la nourriture, les variations de regimes alimentaires, la chaleur, tout participe a provoquer des touristas qui affaiblissent toujours un peu l'organisme. La encore, a chaque fois, un jour d'arret s'impose. Je suis cependant assez content de moi dans ce domaine, car si j'en crois les recits d'autres voyageurs, je m'en sors plutot bien et fais preuve de resistance : la preuve, j'arrive a boire l'eau du robinet en Inde sans etre malade, ce qui, au dire de certains, est impossible pour un occidentale.

Dans ces conditions, il est parfois difficile de garder l'esprit ouvert pour rester objectif face aux nouveautes. Je deviens blaze, aussi : j'ai vu tellement de belles choses depuis mon depart que je suis parfois incapable d'apprecier le reste. Je m'en rends compte quand j'entends d'autres touristes s'extasier "Oh! Que c'est beau !" alors que moi, je me dis "Mouais, bof..."

Car c'est le premier des points positifs de ces 6 derniers mois : j'en ai vu des belles choses ! Les bazars de Turquie et d'Iran, les ruines de Persepolis, les domes d'Ispahan, les medrassas de Samarcande, les montagnes khyrghizes, les cimes de l'Himalaya... Autant de merveilles qui m'ont laisse des souvenirs pour la vie !

J'ai rencontre des cultures variees, des gens differents. En traversant l'Europe, je n'ai pas cherche le contact avec la population : d'abord parce que je n'en eprouvais pas le besoin, ensuite parce que je savais que je trouverais la meme chose qu'en France, a peu pres. Mais ici, non seulement mon sac allege me rendais dependant pour le logement, mais en plus, les gens allaient (et vont encore) vers moi pour connaitre l'etranger de passage : j'ai appris a etablir le contact, a apprecier l'hospitalite... qui s'est avere un excellent moyen pour mieux comprendre les societes dans lesquelles j'evoluais : les gens parlent mieux quand ils sont chez eux, et j'ai le temps de poser toutes sortent de questions...

Je me suis donc decouvert un cote tres "social" pendant cette periode.

J'ai aussi appris a "des-apprendre", nottamment en Iran. Je savais en partant que la televisions et tous les autres medias nous manipulent plus ou moins volontairement, quelque soit le pays. Mais je n'imaginais pas a quel point ! Je pensais connaitre tout de meme un petit peu l'Iran : je connaissais quelques histoires, j'avais lu "Persepolis", et il y avait tous ces reportages a la tele... Mais en fait, non. J'ai ete contraint de rayer toutes mes idees recues et j'ai entierement decouvert le pays pas a pas. Notamment grace a Nastaran, et aux nombreuses personnes avec qui j'ai pu discuter 5 minutes sur le bord de la route, a l'occasion d'un "cai", par exemple...

De meme pour le Pakistan. Et a l'inverse, j'ai entendu tellement de bien de l'Ouzbekistan et de l'Inde quand j'etais en France que j'ai senti une certaine desillusion une fois sur place. Retour sur Terre.

Si je compare mon arrivee a New Delhi a celle d'Istanbul, je ne trouve pas grand chose de commun : d'abord, je n'ai pas l'intention de m'arreter, alors pour moi, la capitale indienne est juste une ville-etape comme les autres. Ensuite, je sens aujourd'hui que je peux arriver a Shanghai, je peux le faire (meme si ca reste toujours a prouver), et je suis impatient de finir : finalement, 2 ans de voyage dans ces conditions particulieres, c'est long. Un peu trop. Je commence a avoir envie de rentrer, alors autant achever le voyage sans trop trainer.

Donc je me programme un petit tour au Cachemire, et je repars sur la route vers Agra.